Didacticiel de Taïga Launwitch

C'est comme se réveiller tranquillement d'un long et profond sommeil, ça devrait être le matin sans un bon lit douillet avec la fraîcheur matinale et la rosée. Il a peut'être plu cette nuit, et les rayons du Soleil cristallise ses gouttelettes en une pierre précieuse, des millions et des millions de pierres précieuses. L'arôme de l'herbe humide, l'odeur du café que l'hôte de la maison prépare avec le son de la télévision en fond sonore sur la chaîne des émissions enfantines. Voilà ce quoi je pourrais m'attendre, mais pas maintenant. Rien, pas d'odeur ni de son, juste un silence inquiétant qui pourtant, m'offre un très beau paysage. Je fronce légèrement les sourcils en me frottant les yeux tout en me redressant, l'incompréhension ne tarde pas à me tomber dessus.
C'est dans ce silence écrasant que je regarde autour de moi avec une mine fermée, c'était très beau, mais vide. Il n'y avait rien de vivant ou de réel à mon goût, si c'était un rêve, alors j'aimerais bien quitter cet endroit délicieusement déprimant. Je ne connaissais rien ici, et même s'il m'arrive de faire des rêves aussi réalistes -et plus vivants- que celui-là, en cet instant précis j'avais un étrange pressentiment. Tel un endroit méconnu et peut-être illusoire, mon instinct m'intimait la méfiance et une prudence que je ne prenais pas tous le temps.

" Où est-ce que je suis encore tombée ?! "

La fureur de ma pensée ne ressort pas de mon attitude cadrée et contrôlée, j'avais beau être silencieuse, mon intérieur était comme un ouragan de colère et d'incompréhension prêt à exploser. Je suis très vite dérangée par un chant juvénile et candide à mon dos, je regarde par dessus mon épaule pour scruter une délicieuse jeune fille qui chantait en jouant avec l'eau. Un bleu cristallin, tout comme le bleu pâle de mon vêtement, je me sentais légère comme plus plume et féminine. Mais en cet instant, j'aurais préféré ne pas paraître aussi vulnérable, un katana ou mon arme m'auraient suffit.
J'écarquille brièvement les yeux comme frappée de plein fouet par une révélation et je me regarde, de la tête au pied jusqu'à ma chevelure. Mon corps ressemblait anormalement à ...
Du calme et du contrôle, je ne comprenais pas à part le fait que j'étais dans le corps d'une de mes créations dans l'un des jeux de rôles auxquels j'ai l'habitude de jouer. Soit c'était un rêve très étrange, soit j'étais enfermé dans ce jeu, mais c'était bien trop farfelue pour que ça puisse être. Je décide tout de même de jouer le jeu, sans mauvais jeu de mot.

Me redressant, je contourne le banc et croise les bras d'un air circonspect tout en détaillant du regard la brunette aux couettes enfantine. L'innocence débordait par tous les pores de sa peau, mais je m'en méfie. Elle chante une douce chanson en boucle depuis tout à l'heure.
L'agacement commence à me gagner avec l'impatience, mais il n'est pas l'heure des hostilité, non pas que je ne sache pas me battre, mais il est sûrement plus sage de poser des questions avant de se battre, même si d'habitude je fais le contraire.
Regardant directement la gamine bien habillée, et très mignonne, je soupire en souriant brièvement d'un air amusé. J'aimais beaucoup l'ironie des deux derniers vers de sa chanson, chanter par une petite voix avec des mots très glauque.

_ Je ne porte que ce genre de vêtement quand je suis dans mon jardin et jamais en dehors, et toi-même tu ne sembles pas normale, ça serait très aimable de ta part de m’éclaircir de quelques peu mes réflexions, s'il te plaît ? demandé-je d'une voix calme.

Bloc ? Docteur ? Utopia ? Ils n'auraient pas pu trouver mieux, sérieusement ? J'arque un sourcil incrédule alors que l'attitude de cette jeune fille commence à m'agacer légèrement en s'agitant ainsi. Mais je ne dis rien et la laisse dans sa tirade, puis elle finit par s"arrêter et consulte une étrange montre en forme de bracelet et le tapote. Cela ressemble trop à une forme de configuration technologique, et ce petit objet me rappelle étrangement ce même genre de tablette que je n'ai jamais daigné à m'offrir, je n'y voyais nullement l'utilité. Adossée contre un obstacle pour me maintenir, j'avais la désagréable impression d'avoir les jambes comme engourdies alors que je voulais tout simplement m'éloigner pour ne plus la voir et me barrer, juste pour être tranquille. Mon instinct ne cesse de me hurler dessus, mais je réprimandais vivement cette voix dans ma tête que je ne pouvais rien faire. En signe de mon mécontentement et perplexité, je fronce les sourcils sans décroiser les bras en regardant mes pieds du coin de l’œil, je ne peux plus bouger. Je n'avais rien pour me défendre et je me fichais de ce que cette fille faisait, malgré la volonté de vouloir l'injurier et arracher chacune de ses dents si je réussis à la choper -car je peux toujours contrôler ma partie supérieure-, ça ne servirai à rien. Je ne sais toujours pas de quoi il en retourne, je pourrai peut-être me venger un jour, on verra bien si je suis toujours vivante d'ici là.

Je voyais le reflet luminescent de mes pupilles qui tremblote subtilement quand je fixe un point à cause de ma colère intérieure, je n'ai jamais pu me débarrassée d'elle, mais j'ai appris à me contrôler. Seul mon regard ou mon comportement très calme pouvait dénoncer mon état, mais il fallait me connaître de près ou être très observateur.
Je reporte mon attention à la jeune fille alors qu'elle fait de même au même moment, mais je me mure dans mon silence tandis qu'elle reprend une longue tirade de sa petite voix fluette. Elle me détaille mon physique avec une précision étonnante, mais je ne scille guère si ce n'est que de la fixer dans le blanc des yeux. Ma tête suivait le mouvement de la petite, jusqu'à ce qu'elle aille au banc. Je serre les dents, détestant avoir une présence dans mon dos sans pouvoir bouger. Alors je ferme les yeux en détournant ma tête face à la rivière, ressourçant mon calme dans le bruit cristallin du cours d'eau et de la senteur humide de l'herbe qui revenait étrangement, j’essayais de me couper de mon interlocutrice. Peut-être est-ce que j'espère m'échapper et revenir dans la réalité, mais je n'obtiens que l'apaisement de ces ressources naturelles, comme le temps qui passe lentement et inexorablement. Chaque seconde, au moins je ne semble pas figer dans le temps, et j'étais définitivement bien dans la peau de ma création.

Je reviens brusquement à la réalité, sortant de ma bulle mais gardant toujours les yeux fermés pour bien entendre chaque bruissement de la jeune adolescente aux yeux vert. J'essaye de me remémorer, être magicienne et vouloir devenir un démon ? Ca avait été mon choix de base quand j'ai vu ce jeu, les démons sont généralement des individus qui ne comptent que pour eux-même mais sont étrangement prisonniers de leur conditions, comme des êtres humains. Et puis c'est ma vision, qui ne me dit pas qu'ici ils obéissent à une autorité ? Elementariste m'avait intéressé, au moins je reste bien vivante et je ferai en sorte d'être tranquille si je dois être prisonnière dans cette drôle de dimension, et puis je pourrais essayer de contrôler ma pyromanie, et ainsi ne plus me priver de briquet au risque de brûler ma maison et l'école intentionnellement à cause de mes sois-disant "amis".
L'air de la chansonnette qu'elle chantait précédemment s'emet de nouveau, et un sourire sardonique se dessine sur mes lèvres en me rappelant des dernières paroles. Et malgré tout, je pense que c'est à cause d'une stupide chanson qui m'a donné le choix.

_ Elementariste, choix validé.

Dès l'instant où je prononce ces paroles, mes jambes manquent de me faire tomber, je m'appuie contre mon obstacle et tourne sur moi-même? Puis je me place silencieusement aux côtés de la jeune fille en regardant face à moi, humant toujours cette agréable odeur de l'herbe humide. Quoique je choisisse, cette fille se fiche éperdument de moi, tout cette mascarade semble n'être qu'une formalité pour elle. J'espère juste ne pas la recroiser dès que j'en aurais terminer, je ne l'aime pas, elle est "trop" innocente et ça m'inquiète. Peut-être que je me méfie trop, mais je suis comme ça. Je veux juste en finir au plus vite. J'attends alors patiemment la suite des opérations.

J'avais les yeux fermés, me délectant doucement de la douce fraîcheur qui s'installe avec le vent qui s'engouffre dans mes sinus. Je commence tout juste à me sentir mieux, est-ce étrange ? Je n'étais pas fan d'un paysage très ensoleillé. Ma tête est légèrement relevée vers le ciel pour apprécier le changement subtil, cela me faisait du bien. Je regarde du coin de l’œil la douce jeune fille qui se mettait à rire avant de féliciter mon choix, je n'ai pu m'empêcher d'afficher un sourire en coin amusée moi aussi. Toutefois, je regarde étrangement ce qu'elle vient de me passer, et arbore maintenant mon poignet, une montre semblable à cette fille. Le cuir est assez agréable au toucher, je le tripatouille quelques instants.
Comme un déclencheur quelconque, une voix dénuée d'émotions et froide de chaleur pour moi me vient jusque dans les tympans, je ne peux m'empêcher de frissonner, comme si le froid absorbait toute la chaleur de mon corps. Je porte mes yeux à la petite brune qui ne fait évidemment pas attention à moi même si ses mots me sont adressés, un ordinateur de bord ambulant, c'est exactement ça.

J'écoute patiemment les informations de la jeune adolescente, tout en apprenant que je portais à mon tour une montre de vie qui semble m'être vital pour ma "nouvelle" vie. Ce que retiens principalement ou ce qui m'a plutôt intriguée du moins, reste le fait que je devrais souvent me nourrir très souvent de feu comme un vampire pour le sang et que si je ne contrôle pas ma colère, ce n'est pas mon mur qui paiera mais plutôt l'objet de ma colère qui devrait payer de sa vie. Je devrai faire très attention, c'est bien ce que je pensais, c'est un bon moyen pour essayer de garder un self contrôle hors du commun, même si c'est jouer avec le feu. Sans mauvais jeu de mot.

Bon Dieu, dîtes moi comment ça se fait qu'un tel jeu puisse exister, et pour quels dessins ?

Je cligne plusieurs fois des yeux au moment où la gamine saute vivement de sa place pour s'étirer, comme pour reprendre le contrôle d'elle-même, est-elle au moins une véritable personne qui est passée à ma place ? Aucune idée.
Elle se tourne d'un air candide vers moi avec la banane sur le visage, je me contente d'arquer un sourcil tout en souriant du coin à sa remarque. Ouais, la complexité et contradiction sont de paire dans ma petite tête.

_ Mon premier achat ?

Je songe aux paroles de la jeune fille pour décortiquer mentalement ses paroles.

_ Compris la demoiselle, dis-je souriant sournoisement.

Je regarde ma nouvelle "montre de vie" tout en essayant de tapoter ou faire quelques manipulations pour accéder à ce "premier achat ", exceptionnellement je n'aurai pas besoin d'aller à ce bloc. Et si je devrais m'améliorer je devrai y aller quand je pourrai "augmenter" mes stats. Exactement comme un jeu vidéo, je voyais parfaitement où elle voulait en venir.
Je finis par reporter de nouveau mon attention à la miss.

_ Ca devrait être bon maintenant ?

Un mauvais pressentiment, voilà comment sonne les adieux de la jeune fille à mes oreilles malgré sa douce voix. Puis elle s'éloigna quelques instants alors que je scrute le ciel ombrageux, je fronce légèrement les sourcils, un danger ? Ce n'était pas normal que le temps change aussi vite. Un étrange lueur s'engouffre dans ma poitrine, je remarque que ça vient de l'adolescente, perplexe je l'interroge du regard. Des vies ? Je vais mourir ?
La jeune fille cesse de rire, tomba à genoux et s'enveloppe fébrilement le corps de ses mains en tremblant, soudainement prise d'une faiblesse. Malgré son état, elle parvient à me dire ses quelques derniers mots de dire bonjour au Docteur. Je lui fait un petit signe de la main, elle semblait ne pouvoir quitter cet endroit, et je ne sais pas si je m'apprête à la revoir. Dans un monde comme celui-ci, je préfère prendre d'abord mes marques avant d'aller voir les gens, je connaissais déjà ma quête dans ce "jeu". On m'a arraché à ma fille, et je me retrouve seule, qu'importe si je suis destinée à rester prisonnière ou non, je veux juste tuer celui qui est derrière tout ça. J'expire l'air violemment de mes poumons, qui allait me dicter si j'allais vivre ou non ? Même dans un jeux vidéo, et à quoi cela sert de mourir dans un didacticiel si c'est pour me griller une vie obligatoirement ? Cela est-il une étape indispensable pour en terminer réellement ? Je serre les dents, si je pensais juste, j'allais mourir et quitter cette "vie" qui ne devait être qu'unique avant de mourir définitivement, ils n'ont pas le droit de me l'enlever.

Mon corps menaçait de céder sous la froid glacial et le vent violent qui déferle sur moi, le "danger" allait venir mais j'étais tellement furieuse contre celui qui m'a enlevé que je ne me rendais pas immédiatement compte de ma mort qui allait arriver. Mes yeux s'injectaient de sang, la pression de ma folie menace d'exploser, j'aimerais tout brûler, jus'au noyau du serveur de ce jeu, même si je devais en mourir.

Une effroyable bête se pose violemment sur le sol, au-dessus de la gamine qui ne réagit pas. Je ne pouvais pas avoir peur, à l'instant présent, je vouais une haine irréversible envers celui qui m'a déchiré de ma famille, ils étaient vulnérables sans moi et ma fille qui n'est encore qu'une enfant est en danger de mort. Si je reviens un jour dans la vraie vie, je m'assurerai à chaque fois de leur santé, je ne deviendrai plus qu'une ombre, comme je l'ai toujours été en réalité. Je brûlerai tout ceux qui sont derrière tout ça, je ne suis pas un pion qu'on peut contrôler ainsi. Je me ferai un plaisir de faire tout en mon pouvoir. On ne touche pas à ce qui m'appartiens, surtout mon âme.

Je relève vivement la tête en regardant d'un air sauvage la stupéfiante créature squelettique aux ailes déchues, mes yeux s'écarquillent et on pourrai jurer voir la lueur de mes yeux luisant d'un feu vert meurtrier en moi. Elle me fixe aussi pendant quelques instants, mon âme noirci par les hommes et débordant d'une colère contenue depuis des années pouvait être encore plus monstrueux que ce monstre malgré tout magnifique dans sa prestance. Je sais, je vais mourir, qu'il en soit ainsi, mais sans peur.

_ Je me vengerai pour cette vie ôter, dis-je dans un sombre murmure remplie de colère à l'attention du Maître de ce monde.

Le Dragon Blanc ouvre quand sa gueule, sa gorge semble ronronner de puissantes vibrations qui ne tarderont pas à éclater dans un hurlement strident et terrible. Un sourire désabusé et défiant se dessine sur mes lèvres alors que j'ouvre mes bras comme pour l'accueillir, les paumes vers les cieux.
La violente déflagration me frappe de plein fouet et je suis violemment projetée en arrière pour percuter un obstacle qui était sûrement de pierre, ce les ténèbres m'ont emporté dans l’inconscience alors que le sang s'écoule lentement. Je n'ai su ce que me fait par la suite la créature, mais je suis morte. J'avais l'impression d'avoir signé un pacte avec le Diable contre mon gré.